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L’hypothèque spéciale du syndicat de copropriété

L’hypothèque spéciale du syndicat de copropriété

L’hypothèque spéciale du syndicat de copropriété

En matière de copropriété, le recouvrement des charges impayées constitue un enjeu majeur pour la pérennité financière de l’immeuble. Parmi les outils juridiques à la disposition du syndicat des copropriétaires, l’hypothèque légale spéciale se distingue par son efficacité, notamment en cas de vente du lot appartenant au copropriétaire défaillant (article 19 Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965

 

Cadre juridique

L’hypothèque légale spéciale est une sûreté réelle sans dépossession qui confère au syndicat un droit de préférence sur le lot du copropriétaire débiteur. Elle garantit le paiement des créances du syndicat, telles que les charges de copropriété, les travaux ou les cotisations au fonds de travaux.

Depuis l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, ce mécanisme a remplacé le privilège immobilier spécial, offrant ainsi une meilleure sécurité juridique au syndicat

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Célia Zeig

COLLABORATRICE ACTA
Service locatif
Titulaire M2 droit de la responsabilité et de la réparation

Conditions d’application de l’hypothèque légale spéciale

Pour que l’hypothèque légale spéciale produise ses effets, deux conditions cumulatives doivent être remplies :

  1. Le copropriétaire est débiteur du syndicat pour charges de copropriété, travaux, cotisations au fonds de travaux ou condamnations judiciaires.
  2. Le lot est vendu à titre onéreux (vente amiable ou vente forcée).

 

L’hypothèque peut être inscrite :

  1. soit après une mise en demeure restée infructueuse, visant le paiement d’une dette devenue exigible,

  2. soit dès que le copropriétaire invoque les dispositions de l’article 33 de la présente loi.

Pourquoi ne pas agir seul ?​

Mise en œuvre : la procédure d’opposition du syndic

Lorsqu’un acte de vente d’un lot ou d’une fraction de lot est en cours de préparation, le notaire sollicite le syndic de copropriété afin que ce dernier lui transmette un état daté des charges. Ce document, qui peut être établi à titre provisoire sous réserve de l’apurement définitif des comptes, mentionne les sommes dues au titre du lot concerné. Ensuite, le notaire adresse au syndic un avis de mutation par lettre recommandée avec accusé de réception.

Cette notification constitue une étape essentielle. En son absence, l’acte de vente est inopposable au syndicat, tant pour le transfert de propriété que pour le paiement du prix au vendeur. Lorsque la notification est régulièrement effectuée, elle fait courir un délai de quinze jours pendant lequel le syndic peut valablement former opposition au paiement du prix.

En cas de vente judiciaire (enchères publiques, licitation ou saisie immobilière), la même information relative au transfert de propriété doit être communiquée au syndic. Cette formalité incombe au notaire instrumentaire ou, selon les cas, à l’avocat du créancier poursuivant ou du demandeur à la vente.

Une fois l’avis de mutation reçu, le syndic peut alors exercer son droit d’opposition, sous réserve du strict respect des conditions de forme.

L’opposition du syndic

  • La validité de l’opposition formée par le syndic est strictement encadrée par l’article 5-1 du décret du 17 mars 1967. Elle doit être :

    • Notifiée à l’adresse élue dans l’avis de mutation (Cass Civ 3e 28 février 2001 99-15.330)
    • Réalisée par acte extrajudiciaire (signification par commissaire de justice),
    • Motivée : l’acte doit énoncer précisément le montant de la créance et ses causes (Cass Civ 3e 25 octobre 2006 05-16.835)

    La jurisprudence sanctionne sévèrement toute irrégularité formelle, en annulant l’opposition défectueuse, ce qui prive le syndicat du bénéfice de l’hypothèque légale spéciale.

L’article 5-1 impose une ventilation précise de la créance en quatre catégories :

Les charges et travaux afférents à l’année en cours et aux deux années précédentes, garantis par une hypothèque légale bénéficiant d’un rang prioritaire (hors concours) ;

  1. Les créances des deux années antérieures à celles visées ci-dessus, garanties par une hypothèque légale soumise à concours avec les créanciers bénéficiant d’une hypothèque du vendeur ou du prêteur de deniers ;
  2. Les créances garanties par une hypothèque légale mais ne relevant d’aucune des deux premières catégories ;
  3. Les créances chirographaires, c’est-à-dire non garanties par une sûreté réelle.

En l’absence de cette ventilation, l’opposition est nulle (Cass. 3e civ., 15 déc. 2004, n° 03-15.174 ; Cass. 3e civ., 25 oct. 2006, n° 05-16.835).

L’effet de l’opposition est immédiat : elle bloque la remise du prix de vente entre les mains du vendeur. Ce prix devient alors une masse à répartir conformément à l’ordre légal des priorités, auquel aucune convention particulière entre les parties ne peut déroger.

Pourquoi ne pas agir seul ?​

Rang de l’hypothèque légale spéciale

L’efficacité de l’hypothèque légale spéciale dépend de l’ancienneté des créances en cause. Conformément à l’article 2418, alinéa 2 du Code civil, l’hypothèque légale spéciale du syndicat des copropriétaires est automatiquement opposable sans inscription pour les créances afférentes à l’année en cours (N) et aux deux années précédentes (N-1 et N-2). Pour ces créances récentes, le syndicat est considéré comme superprivilégié : il prime tous les autres créanciers.

En revanche, pour les créances plus anciennes (N-3, N-4), la situation est différente. Le syndicat ne bénéficie d’aucune priorité automatique. Pour que ces créances soient garanties, il doit impérativement procéder à une inscription hypothécaire formelle auprès du service de la publicité foncière, conformément aux articles 2425 et suivants du Code civil.

Cette inscription permet non seulement de conserver un droit de préférence, mais également un droit de suite en cas de revente du bien à un tiers. Elle est donc fortement recommandée dans les situations où des impayés anciens sont constatés et où une vente du lot est envisagée ou probable.

 

L’hypothèque légale spéciale constitue un instrument central de la politique de recouvrement du syndicat de copropriété. Par son efficacité renforcée depuis la réforme de 2021, elle offre au syndicat une garantie précieuse, à condition que les formalités soient scrupuleusement respectées. À l’heure où de nombreuses copropriétés font face à une augmentation des impayés, sa maîtrise opérationnelle par les syndics et les professionnels du droit apparaît plus que jamais essentielle.

L’efficacité du dispositif de recouvrement des charges, dont l’hypothèque légale spéciale est un pilier, repose également sur l’article 10-1 de la même loi, qui précise la répartition des frais imputables à un seul copropriétaire.

Cet article permet au syndicat de faire supporter exclusivement au copropriétaire défaillant les frais engagés pour le recouvrement de sa dette :

Frais de mise en demeure, de relance, de prise d’hypothèque ou d’actes de commissaire de justice, honoraires spécifiques du syndic pour les démarches effectuées à son profit, et, le cas échéant, les frais de travaux réalisés sur ses parties privatives ou les astreintes dues à sa carence.

Ainsi, l’article 10-1 complète directement le régime de l’hypothèque légale spéciale : le syndicat est protégé financièrement non seulement par une sûreté réelle sur le lot du débiteur, mais aussi par la possibilité de répercuter les frais de recouvrement sur le seul copropriétaire concerné.

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